Sera-t-il bientôt impossible de filmer les forces de l’ordre en exercice en France ? Si elle devait être appliquée, la proposition de loi « sécurité globale » actuellement examinée à l’Assemblée nationale interdira, de fait, la diffusion d’images de forces de l’ordre. Le point sur le sujet avec Boris Lefebvre.
La proposition de loi vue de Normandie
L’entrée en vigueur de la proposition de loi de sécurité globale ne réjouit pas en Normandie, c’est le moins que l’on puisse dire. En effet, on voit d’un mauvais œil l’entrée en vigueur de cette législation, comme le souligne une avocate au barreau de Rouen : « On va développer les caméras-piétons et autoriser la surveillance des manifestants par drone. L’équilibre de cette loi est inquiétant, l’article 24 est scandaleux ». Ce que l’avocate remet en cause, c’est le fait qu’il y aura plus de moyens pour contrôler les citoyens, mais moins pour vérifier la légitimité de l’action de la force publique.
Concrètement, la proposition de loi de sécurité globale prévoir de rendre illégale la diffusion d’images de forces de l’ordre si elles sont reconnaissables, et si la diffusion se fait dans le but de porter atteinte à la santé physique ou psychique du fonctionnaire. On craint donc une éventuelle utilisation arbitraire de cette disposition par les forces de l’ordre, afin d’interdire la prise d’images à des moments où leurs actions pourraient être remises en question. Ainsi, cela risque d’affecter la protection des journalistes, au cas où les forces de l’ordre estiment que la captation représente un danger.
Une mesure nécessaire pour renforcer la protection des policiers
Le secrétaire zonal adjoint Alternative Police CFDT chargé de la Haute-Normandie estime pour sa part que « cet article (24) est là pour renforcer la protection des policiers, je ne vois pas en quoi il va empêcher le travail des journalistes. C’est une mesure nécessaire, de plus en plus de collègues sont reconnus dans leur vie privée », avant de poursuivre : « Les caméras-piétons sont plébiscitées par les collègues, car on n’a rien à cacher. On souhaite que notre parole arrête d’être remise en cause ».
De son côté, le secrétaire national Unité SGP Police, délégué zone ouest, Frédéric Desguerre souhaite aller encore plus loin : « Nous ne sommes pas contre le fait de filmer, mais il faut que les visages des policiers soient floutés ». Selon M. Desguerre, cela ne posera aucun problème d’identification, puisqu’il y a le numéro Rio, la géolocalisation… Toutefois, notons à ce niveau qu’à de nombreuses reprises, le numéro Rio, soit les 7 chiffres qui permettent d’identifier un fonctionnaire, n’est pas toujours porté de façon visible lors des interventions. Notons également que cette loi qui fait consensus au sein des syndicats de police majoritaires, ne remporte pas les faveurs d’autres syndicats moins représentatifs de la profession comme Sud police, qui ne demandent pas le vote de cette loi.