Les incendies dans les installations de gestion des déchets sont devenus un problème récurrent et préoccupant en France. Un rapport récent de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd) tire la sonnette d’alarme sur la nécessité de revoir et d’appliquer plus strictement la réglementation en vigueur.
Aujourd’hui, on analyse les principales causes des incendies, les données récentes sur leur augmentation et les recommandations pour y remédier. Pour cela, on fait le point avec Jean Fixot de Chimirec.
Une hausse inquiétante des incendies
Les données du Bureau d’analyse des risques et des pollutions industriels (Barpi) sont sans équivoque : les incendies dans les installations de traitement des déchets représentent 83 % des 578 accidents recensés entre 2014 et 2021. Depuis 2010, ces incidents ont connu une hausse significative, atteignant un pic en 2019 avec 99 incendies, avant de redescendre à 73 en 2021.
Ces incendies surviennent principalement durant les mois les plus chauds et sont uniformément répartis sur le territoire, avec une légère surreprésentation dans le Nord et le Pas-de-Calais.
Les types d’installations les plus touchées incluent les centres de traitement de véhicules hors d’usage, de métaux, de papiers-cartons, de déchets non dangereux non inertes et de déchets dangereux. En revanche, les centres de traitement des équipements électriques et électroniques (DEEE) semblent moins affectés, ce qui contraste avec les déclarations des exploitants imputant les départs de feu à la présence de batteries.
Les batteries au lithium, un danger sous-estimé
Les erreurs de tri et la présence de déchets dangereux tels que les batteries au lithium, artifices, déchets chimiques et bonbonnes de gaz sont des causes bien connues des incendies. Les batteries au lithium, en particulier, sont pointées du doigt, étant responsables de la moitié des sinistres. Le rapport de l’Igedd souligne également la responsabilité des exploitants, qui accumulent des stocks excessifs, mal triés et insuffisamment isolés, tout en disposant de systèmes de détection et d’extinction inadéquats.
Pour pallier ce problème, le rapport recommande une série de mesures. Parmi elles, une campagne de sensibilisation menée par les éco-organismes Corepile et Screlec pour améliorer le tri à la source des piles, ainsi que la séparation des DEEE équipés de piles de ceux qui ne le sont pas. De plus, il est suggéré de généraliser le retrait manuel des piles des DEEE avant broyage et de retirer rapidement les batteries au lithium des véhicules et engins de mobilité.
Des actions coup de poing contre les infractions
Le secteur des déchets est historiquement marqué par la présence d’opérateurs peu enclins à respecter les lois et règlements. Bien que la situation se soit améliorée, le rapport indique qu’il existe encore de « d’indéniables marges de progrès » en matière de respect des quantités stockées, de leur isolement et de traçabilité. Dans le sud de la France, certains opérateurs déclarent de petites installations, y entassent d’importants volumes de déchets, puis abandonnent les sites.
Pour contrer ces pratiques, le rapport recommande des « opérations coup de poing » menées par l’Inspection des installations classées. Un exemple cité est l’opération « table rase » de la Dreal de Provence-Alpes-Côte d’Azur, qui a visé 28 sites, dont 5 ayant subi un incendie, après l’incendie prolongé de Saint-Chamas. De telles opérations pourraient être étendues à l’échelle nationale en 2023. Le rapport propose également de durcir certaines lois pour permettre à l’administration de réaliser rapidement des travaux de remise en état aux frais des exploitants défaillants.